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L’arbre de la Liberté : symbole révolutionnaire et mémoire vivante

En 1790, un curé de Saint-Gaudent plante un arbre de la Liberté. Ce geste, devenu rituel républicain en 1792, traverse les siècles et il reste quelques arbres de la liberté en France. Des révolutions de 1830 à la tragédie d’Oradour-sur-Glane, ces arbres ont connu l'histoire de France. Ils témoignent d’un engagement, d’une mémoire et d’une symbolique profondément français

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Des plantations d'arbres de la Liberté déjà avant la Révolution : 

 

Saint Gaudent dans la Vienne / Photo choisie par monsieur de France : By Photo: JLPC / Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=27707250v

Saint Gaudent dans la Vienne / Photo choisie par monsieur de France : By Photo: JLPC / Wikimedia Commons, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=27707250v

 

En 1790, le curé de Saint Gaudent, dans la Vienne, décide de planter un arbre qui symboliserait la Liberté. Il n'était pas le seul à avoir eu cette idée. Dans le Quercy et le Périgord, on trouve également des exemples d’arbres plantés pour honorer les idéaux naissants. Encore plus surprenant, un aristocrate — un « ci-devant comte » — avait anticipé ce geste dans le parc de son château à Franconville. Ces cas isolés annonçaient déjà l’union entre la symbolique végétale et la transformation du régime politique. Le chêne et le peuplier s’apprêtaient à devenir les premiers porte-drapeaux enracinés de la toute jeune République.

 

 

L’arbre, un symbole ancien et universel

 

Bien avant la Révolution, l’arbre occupait une place centrale dans l’imaginaire collectif. Les Gaulois leur vouaient presque un culte, considérant certaines espèces comme sacrées. Dans nos cimetières, la présence récurrente de l’if, surnommé « l’arbre des morts », perpétue une tradition multiséculaire. Par ailleurs, dans de nombreuses régions de France, planter un « arbre de mai » symbolisait l’arrivée du printemps et le renouveau. La Révolution s’est donc naturellement appuyée sur ce vocabulaire symbolique pour créer une tradition à la fois populaire et politique.

 

L'if du Pré Catelan. L'if est souvent présent dans les cimetières français Il symbolise les morts / Photo choisie par monsieur de France : Par Liné1 — Picture taken with my IXUS 800 IS, CC BY 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1943848

L'if du Pré Catelan. L'if est souvent présent dans les cimetières français Il symbolise les morts / Photo choisie par monsieur de France : Par Liné1 — Picture taken with my IXUS 800 IS, CC BY 2.5, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=1943848

 

 

Peupliers et chênes : des arbres choisis pour la République

 

Lorsque la Convention entérine la plantation d’arbres de la Liberté en 1792, elle recommande les peupliers. Leur croissance rapide symbolise la vitalité nouvelle du régime. Toutefois, d’autres communes optent pour le chêne, arbre plus lent mais synonyme de force et de durabilité. Le choix botanique devient une déclaration d’intention politique. Hélas, la nature n’est pas toujours coopérative : certains arbres meurent, refusant de pousser, obligeant les habitants à recommencer leur plantation républicaine. Une ironie végétale qui ne décourage pas les convaincus.

 

La plantation d'un arbre de la Liberté en 1792 / Image choisie par Monsieur de France : By Jean-Baptiste Lesueur (1749-1826) - https://www.parismuseescollections.paris.fr/fr/musee-carnavalet/oeuvres/plantation-d-un-arbre-de-la-liberte, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4266237

La plantation d'un arbre de la Liberté en 1792 / Image choisie par Monsieur de France : By Jean-Baptiste Lesueur (1749-1826) - https://www.parismuseescollections.paris.fr/fr/musee-carnavalet/oeuvres/plantation-d-un-arbre-de-la-liberte, Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=4266237

 

 

La chute des arbres de la Liberté à la Restauration de 1815

 

Avec le retour de la monarchie en 1815, les arbres de la Liberté deviennent indésirables. Trop associés à la Révolution et à ses valeurs, ils sont arrachés, sciés, supprimés sans ménagement dans de nombreuses communes. Ce retour de bâton monarchiste illustre bien à quel point ces plantations étaient perçues comme subversives. L’arbre de la Liberté devient alors victime de la revanche politique et il est souvent arraché. Mais pas partout !

 

En 1850, alors que Napoléon III prend le pouvoir, on arrache des arbres de la Liberté / Image choisie par Monsieur de France : By Valentin, Henri, 1820-1855 - This image is available from the Brown University Library under the digital ID 1233676268393531., Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24430825

En 1850, alors que Napoléon III prend le pouvoir, on arrache des arbres de la Liberté / Image choisie par Monsieur de France : By Valentin, Henri, 1820-1855 - This image is available from the Brown University Library under the digital ID 1233676268393531., Public Domain, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=24430825

 

 

1830 et 1848 : les arbres de la Liberté repoussent avec la République

 

À chaque résurgence de la République, les arbres de la Liberté retrouvent leur place. Lors des révolutions de 1830 et de 1848, abolissant à nouveau la monarchie, les Français replantent massivement ces symboles. Certaines de ces plantations ont traversé les siècles. À Bayeux, un spécimen, au pied de la cathédrale, semble avoir défié le temps, arborant une vitalité exemplaire.

 

L'arbre de la Liberté de Bayeux est toujours là / Photo choisie par Monsieur de France : By Tango7174 - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=6483682

L'arbre de la Liberté de Bayeux est toujours là / Photo choisie par Monsieur de France : By Tango7174 - Own work, CC BY-SA 4.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=6483682

 

 

Oradour-sur-Glane : quand l’arbre devient mémoire sacrée

 

Parmi les arbres de la Liberté, celui d’Oradour-sur-Glane est peut-être le plus bouleversant. Planté en 1848 par des habitants heureux de voir revenir la République, il est devenu un survivant tragique. Au printemps 1944, la division SS Das Reich massacre 642 villageois et détruit le village. L’arbre, seul être vivant rescapé, est resté debout. Il n’est plus seulement l’arbre de la Liberté : il est devenu l’arbre du souvenir. Témoin muet de l’horreur, il incarne désormais la mémoire d’un peuple et l’hommage à ses martyrs. En 1989, à Saint Gaudent, là où avait été planté un arbre de la Liberté en 1790, un nouvel arbre a été planté par François Mitterand, président de la République, à l'occasion du bicentenaire de la Révolution Française. Il est toujours là. 

 

L'arbre de la Liberté de Oradour-sur-glane est toujours là, lui qui a vu le massacre de 642 habitants en 1944 / Photo choisie par Monsieur de France : By Babsy - Own work, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3540060

L'arbre de la Liberté de Oradour-sur-glane est toujours là, lui qui a vu le massacre de 642 habitants en 1944 / Photo choisie par Monsieur de France : By Babsy - Own work, CC BY 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=3540060

 

 

Une tradition républicaine enracinée dans le paysage français

 

Les arbres de la Liberté sont plus que de simples décorations ou symboles passagers. Ils sont des repères, des marqueurs du temps et de l’Histoire. Chaque arbre planté évoque un acte de foi républicaine, un rêve collectif de justice et de liberté. Le fait que certains vivent encore aujourd’hui leur donne une charge émotionnelle unique. Enracinés dans la terre comme dans la mémoire, ils continuent de nous rappeler l'idéal de la Révolution Française : la Liberté. 

Image de couverture choisie par Monsieur de France : par Lynn Greyling de Pixabay

Jérôme Monsieur de France

Jérôme Monsieur de France

Jérôme est un "Monsieur de France" parmis tant d'autres.
Il est l’auteur de ce site dédié au tourisme en France, à son histoire et à son patrimoine. Passionné par les richesses historiques, les traditions françaises et les plus beaux lieux du pays, il écrit depuis des années pour différents médias sur les thèmes du patrimoine, du tourisme en France et de la gastronomie régionale. Il partage ici ses idées de séjours, que ce soit pour un week-end ou une semaine, en valorisant les monuments, les personnages historiques, les paysages emblématiques et les recettes typiques. À travers ses récits, il vous invite à découvrir la culture française, ses symboles, et les trésors cachés qui font de la France une destination unique. 

Jérôme Monsieur de France

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