D'où nous vient l'apéro ?
L'apéro est prêt / photo par JP WALLET/Shutterstock.com
Une invention égyptienne
Si on regarde dans nos vieux grimoires, on se rend compte que l'apéritif, c'est vieux comme le monde. Le mot vient d'ailleurs du latin "aperire" qui veut dire "ouvrir". Dans ce cas-là "ouvrir l'appétit". Les Romains le faisaient avant les banquets en buvant du vin et quelques décoctions de plantes censées ouvrir l'appétit, ou faciliter la digestion. La faciliter jusqu'au bout puisqu'on vous servait aussi des boissons laxatives... Ceci dit, avant les Romains, il y a 5000 ans, les Égyptiens se faisaient un petit "heneqet" en partageant quelques dattes en buvant une bière tiède. Les Grecs anciens s'offraient des "symposions", entendez par là "un rendez-vous de buveurs". Il en profitaient pour philosopher (et c'est une habitude que les Français continuent il suffit de les écouter à l'apéro ahah).
Continuée par les chevaliers du moyen-âge
Un banquet au Moyen-âge / Dessin du XVe siècle
Avant les fameux banquets qui duraient fort longtemps avec ménestrels et compagnie, les chevaliers aimaient déjà boire quelques coups en grignotant un peu. Ils avaient l'habitude d'entrechoquer leurs verres pour marquer l'amitié. Une habitude bien pratique aussi pour éviter de mourir, puisqu'en entrechoquant les chopes assez fort, les liquides pouvaient se mélanger, et s'il vous venait d'empoisonner un convive, vous vous empoisonniez aussi. On disait déjà "santé" parce qu'on pensait que boire du vin "lavait" le corps et que c'était bon pour la santé. On se regardait aussi dans les yeux, pour y sonder l'âme du convive. Une tradition qui est restée, notamment parce que je ne sais qui a décrété qu'on flanquait 7 ans de malheur sexuel à quelqu'un en ne le regardant pas dans les yeux au moment de trinquer. "Trinquer", ce mot qui vient visiblement de l'allemand "trinken" qui voulait dire boire. Tant qu'à parler de mots d'ailleurs devenus Français avec l'apéro, il semble que ce soient les Anglais qui aient commencé à dire "tchin tchin" en s'inspirant du chinois "tsin tsin" qui voulait dire "salut". Pas sûr que ce soit vrai, mais l'anecdote peut faire son effet à l'apéro et on aime bien avoir des trucs à dire en piochant dans le bol de cacahuètes.
Le XIXe siècle invente l'apéritif médicinal
Chez les riches, notamment à la cour de l'empereur Napoléon III, on prend l'habitude d'un moment pour discuter en buvant du vin blanc ou du cognac, tout en grignotant des toasts, notamment à la tapenade, inventée, elle, pendant la Renaissance. L'exode rural et le développement des mines et des usines ont beaucoup fait pour l'apéro, puisque, partis de leurs villages, de nombreux hommes, ne connaissant personne dans leur lieu de travail, se sont retrouvés dans la multitude de petits cafés que comptait la France pour y boire un verre et faire connaissance. Une habitude prise aussi par les jeunes appelés du service militaire effectué bien souvent loin de chez eux.
L'apéritif médical de Dubonnet
Une pub pour Dubonnet par Jules Cheret via Wikipédia
En 1846, à Paris, près de l'endroit où se trouve l'Opéra de Paris, le chimiste Joseph Dubonnet (1818-1871) invente une boisson à base de quinquina pour lutter contre le paludisme. Absolument infecte au goût, il décide de lui ajouter de quoi la rendre agréable, des herbes et du vin principalement, créant ce qui est devenu le "Dubonnet". Apprécié des soldats de la Légion Etrangères, qui en buvaient quand ils devaient intervenir dans des zones marécageuses, il est aussi apprécié... Des amis de Monsieur Dubonnet, à qui l'épouse de l'inventeur a eu l'idée de servir la boisson de son mari. C'est le bouche à oreille qui a fait du Dubonnet une boisson célèbre, toujours un peu associée à la notion de santé puisqu'on y mettait de la quinine.
Des apéritifs autrement dit des "boissons apéritives"
Des boissons aperitives : Photo by Alessio Zaccaria on Unsplash
Le Dubonnet a été suivi du pastis, incontournable dans le sud, particulièrement en Provence, à la fin du XIXe siècle. Depuis, toute une série d'apéritif, donc de boissons alcoolisées censées ouvrir l'appétit, ont rejoint la collection. Le pastis, à la fin du XIXe siècle, est devenu emblématique du Sud et de la Provence en particulier. Le martini est arrivé d'Italie au XXe siècle. Les vins "cuits" sont devenus à la mode. Depuis quelques années, le vin "tout court", blanc ou rouge, voire rosé surtout en été, a détrôné les boissons apéritives. La bière est toujours présente, notamment dans les apéros en café. Et on voit de plus en plus de gens trinquer avec un verre de spritz, cette boisson inventée à Venise au XIXe siècle et qui a conquis la France.
Un apéritif français, c'est quoi ?
Aperitif et son accompagnement version fromages / photo par Nick Starichenko/Shutterstock.com
C'est bien de préciser "Français" parce qu'on n'est pas les seuls à avoir inventé un moment pour boire un verre et grignoter avec les amis. Les Italiens se font des antipastis, et les Espagnols les fameux tapas. En France, c'est une autre manière de faire. On peut boire l'apero tout seul, mais bien souvent, c'est un rite. On se retrouve avec des gens qu'on apprécie, on discute et on essaie toujours d'ajouter de l'humour dans la conversation. On peut le faire avant le repas de midi, ou avant celui du soir, même si celui du soir est plus pratiqué. C'est aussi un rendez-vous de vacances, l'apéro : il symbolise un moment de détente qu'on s'offre, exactement comme le sont les vacances .
Un apéritif avec quoi ?
L'apéro se fait désormais surtout au vin / photo par Yulia Grigoryeva/Shutterstock.com
Désormais, il se fait beaucoup au vin. Blanc, rosé (surtout en été), rouge. On peut aussi se le faire à bière bien sûr, voire au champagne. Et on peut toujours boire des apéritifs genre Dubonnet, Martini etc... On accompagne au minimum d'un peu de cacahuètes ou de chips, qu'on rechargera souvent. Des tranches de saucisson sont souvent les bienvenues, mais on peut aussi croquer des légumes comme les tomates cerises, les carottes et le brocoli en les trempant dans une petite sauce, une petite mayonnaise par exemple.
An aperitif for two StockPhotosLV
Quand on invite chez soi, il est de bon ton d'ajouter quelques petites préparations salées avec de la pâte feuilletée, ou des petits toasts accompagnés par un peu de tapenade, cette délicieuse purée d'olives vertes ou noires. Depuis quelques années, on peut faire des apéros dinatoire dans les cafés en commandant une "planche" sur laquelle on trouvera un mélange de fromages ou de charcuterie (ou les deux !), et quand on fait un apéro dinatoire chez soi, il ressemble de plus en plus aux tapas espagnols puisqu'on propose plusieurs plats constitués de bouchées qu'on peut croquer facilement. Certains mettent juste de quoi faire des tartines en buvant son verre, d'autres font des verrines avec des choses plus élaborées.
Mais attention, si on vous invite à un apéro-dinatoîre vous le saurez : ce sera le seul repas que vous dégusterez.
Une belle tradition que l'apéro, et qui n'en fini pas de prendre de l'importance dans la vie sociale des Français et c'est bien parce que ça prouve qu'ils ont toujours le sens de la convivialité.
Attention, l'abus d'alcool est dangereux pour la santé. Consommez avec modération.
Pas d'age pour l'apéro ! photo Alessandro Pintus shutterstock.com
