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Un ensemble "Patrimoine Mondial de l'Humanité"
Le siècle des Lumières a laissé l'un de ses plus beaux héritages à Nancy, en terre lorraine : l’ensemble constitué de la Place Carrière, de la Place d’Alliance et la Place Stanislas. Ces trois places ont été classées Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’Unesco en 1983, la même année que le si romantique Taj-Mahal et même, quand on y pense, quelques années avant la muraille de Chine. Trois places donc. La place de la Carrière, toute en longueur, terminée par le Palais du Gouvernement et sa belle colonnade, délicieuse dans la brume de l’hiver qui vous offre un tel voyage dans le temps que tout juste si croiser un carrosse vous étonnerait.
La Place de la Carrière. Beaucoup plus ancienne que la Place Stanislas mais dont les façades, qui dataient de la Renaissance, ont été recouvertes de facades XVIIIe au moment de la construction de la Place Stanislas. Au bout, le palais du gouvernement. Photo par Pete Stuart/shutterstock
La Place d’Alliance, plus petite, carrée, et dont la fontaine dédiée à l’étonnante alliance de la France et de l’Autriche se souvient avoir vu passer beaucoup de destins pressés de s’accomplir.
La Place d'Alliance et son monument central dédié à l'Alliance Franco-Autrichienne. Photo par Leonid Andronov/shutterstock
Et enfin. Et j’allais dire, surtout, il y la Place Stanislas. Et parler d’elle, c’est le moment d’écriture le plus difficile quand on a l’honneur qui m’est fait de décrire ma cité. Quand on connait cet endroit, qu’on l’aime de tout son cœur parce qu’il est beau et qu’on y a de nombreux souvenirs chargés d’émotion, on voudrait rameuter l’orphéon de tous les jolis mots qu’on connait et les ciseler pour parvenir à décrire la Merveille de Nancy.
La plus belle place du monde
La Place Stanislas : magique de nuit / Photo par HUANG Zheng/shutterstock
Faites l'inventaire dans votre esprit, et vous verrez que j'ai raison... La Place Saint-Marc à Venise ? Sublime... Mais où sont les volutes de fer forgé ? La Place de la Concorde à Paris ? Mais où est le calme ? Où sont les terrasses ? Cherchez et vous verrez que, parce qu'elle est petite (et donc à taille humain) mais majestueuse (avec ses façades symétriques), élégante (jusque dans les sculptures les plus petite) et complètement folle (avec toutes ces volutes dorées) : cette place est la plus belle du monde.
Un lieu magique
Et on pourrait d'ailleurs se décourager au moment de la décrire et décider de laisser là le clavier et les lettres pour aller s’offrir un petit café, un matin très tôt, quand elle est vide et qu’on peut savourer le jeu de lumières du soleil sur les pierres blanches. Humer l’air du temps en regardant le soleil s’éclater à allumer ces dorures qu’un souffle d’or semble avoir posé délicatement sur les volutes de fer forgé. Quand on entre sur la place, on est impressionné par la noblesse des façades à deux étages qu’on croirait tout droit arrivées de Versailles, mais avec un truc en plus : les volutes de fer forgé dorées à la feuille d’or.
Les grilles de fer forgé sont partout présentes : elles ornent les entrées, les fontaines, elle sont aussi sur les réberbères des facades imaginées par l'architecte Emmanuel Héré. Elles ont été réalisées par le serrurier-ferronnier Jean Lamour en 1755.
Elles ornent tous les balcons des innombrables fenêtres et elles forment de superbes portes aux quatre coins de la Place. Et elles aussi elles ont un truc en plus. Elles ne sont pas seulement belles, elles sont sublimées par les feuilles d’or ce qui les rend éblouissantes en été et scintillantes à la moindre goutte de pluie. D’élégants réverbères rappellent l’or des grilles. Plus loin, statufiés, Neptune, dieu de la Mer, et Amphitrite son épouse, font murmurer l’eau en se demandant peut être s’ils pourront se serrer un jour dans les bras l’un de l’autre.
L'arc Héré. Inspiré de l'Arc de Septime Sévère à Rome (comme le Caroussel du Louvre à Paris). Photo par Pete Stuart/shutterstock
Le couronnement de la Place, c’est l’Arc Héré, coiffé d’une renommée toute dorée qui souffle dans sa trompette son bonheur de vivre à Nancy. L’Opéra National de Lorraine fait résonner les plus grands talents du Monde, le Musée des Beaux-Arts ébloui les esthètes avec ces œuvres de Delacroix, de Claude Gelée dit "Le Lorrain", du génial Emile Friant ou du Caravage, mais aussi avec la plus belle et la plus sublime collection « Daum » en cristal et pâte de verre, totalement née ici du savoir-faire incroyable des verriers Lorrains.
Les amoureux peints en 1888 par Emile Friant (1863 - 1932)
L'acropole de Nancy
Cette place c’est le cœur de la ville, comme l'Acropole l'est pour Athènes. C'est même le symbole de Nancy. Elle a littéralement vu défiler l’Histoire depuis son inauguration en 1755 au pas tranquille du bon gros roi Stanislas qui trône de nos jours au milieu de sa grande œuvre puis que c’est à sa volonté qu’on doit la Merveille. Depuis 1755, son année de naissance, elle a vu Mozart prendre un café et raconter dans une lettre à son père comme la ville de Nancy était belle, elle a vu détruire la statue de Louis XV qui l’ornait, des montgolfières décoller (et rester accrochée pour l’une d’elle à la façade du Grand Hôtel de la reine). Elle a aussi vu des avions allemands de la Grande Guerre pris à l’ennemi être exposés au milieu et remonter le moral des habitants de la ville régulièrement bombardée. La Place Stanislas a aussi vu arriver Patton libérant Nancy, de Gaulle venu célébrer le retour de la Paix, Churchill faire quelques pas. La Reine-mère d’Angleterre est également venue s’extasier devant les dorures, elle qui en avait pourtant vu tant. Le pape lui-même, Jean-Paul II, a fait un tour complet en papamobile dans les années 80.
Rien de plus agréable qu'un petit verre sur l'une des terrasses, après une chaude nuit d'été, quand la fraîcheur gagne la Place Stanislas parées de ses couleurs nocturnes... Photo par Shutterstock
Le lieu où la Cité se retrouve
C’est aussi sur la place qu’on célèbre collectivement les moments de joie. Hier les armistices, la Libération, mais aussi les grandes victoires sportives, récemment les victoires des bleus en 1998 et 2018, mais aussi la Coupe de la Ligue remportée par l’ASNL ou les victoires européennes du SLUC Nancy Basket. On y partage aussi la peine. C'est là qu'on s'est retrouvés lors des attentats de Paris, en défilant silencieusement, ou au contraire en faisant rugir une Marseillaise pleine d’amour de la Liberté et de la France à laquelle
Nancy est fière d’appartenir. C’est cela la Place Stanislas. L’acropole de Nancy.
Le 11 janvier 2015 la manifestation "je suis Charlie" Place Stanislas / photo Monsieur de France (c)
La Place Stan' des nancéiens
Mais c’est aussi un théâtre. . S’il y a un endroit qui rassemble les habitants de la Métropole du Grand Nancy, c’est la « Place Stan » comme on dit par « apocope », autrement dit en abrégé. Ils sont rares les habitants des communes de la Cité à ne pas passer au moins une fois dans l’année, que ce soit en faisant les boutiques, pour amener les petits voir le Grand Saint-Nicolas ou simplement se balader. Et s’il vous prend l’envie de vous poser dans un des beaux cafés de la Place, vous pourrez assister à ce joyeux manège qu’est… La Vie !
Touristes et Nancéiens se retrouvent toujours sur la place Stanislas le coeur de Nancy) Julia Kuznetsova/shutterstock
Tel jeune homme qui vient de se retourner parce qu’il a été épaté de la beauté de telle jolie femme. Tel joli couple qui se promène comme d’autres couples avant lui, notamment celui d’Auguste Bartholdi, le père de la Statue de la Liberté ou du Lion de Belfort, qui trouva ici l’amour en visitant des amis. Il est reparti avec une épouse, Emilie, dont on dit qu’il a donné son visage à l’un des monuments les plus connus dans le monde. On se réjouit avec les étudiants en bamboche le soir venu (ils sont des milliers à Nancy). On s’émeut à regarder tel gamin qui trotte menu vers les fontaines tellement tentantes pour patouiller. Telle vieille dame qui prend son temps pour traverser l’endroit qu’elle a tant vu et qui lui rappelle tant de souvenirs. Tel vieil homme vouté dont la démarche rappelle un peu celle de l’Abbé Pierre qui fut député de Nancy avant de devenir la voix des pauvres dans son pays. Des milliers de destins pressés de s’accomplir sont passés par ici. Certains ont fait briller les sciences ou les arts comme Charlélie Couture, les artistes venus se produire au NJP ou sur nos scènes… D’autres les livres, comme ces centaines d’auteurs qui viennent chaque année partager leur passion lors du Livre sur la Place aux côtés de Philippe Claudel, un Lorrain membre de l'Académie Goncourt, comme ceux qui l'ont fondée d'ailleurs : les fameux frères Goncourt, ou le sport, comme Michel Platini qui a démarré sa carrière ici. Si certains de ces destins ont été glorieux, les plus nombreux sont restés anonymes pour la Grande Histoire, constituant cette trame magnifique qu’est la longue marche de l’humanité depuis la nuit des temps, mais ils ont été essentiels dans la vie d’hommes et de femmes.
Chacun de ces destins a eu son moment ici, une heure, un jour ou des années, sur la plus belle place du monde. A vous de venir y vivre le vôtre.
Quoi voir Place Stanislas à Nancy
Quelques infos.
La place est assez petite : 106 par 124 mètres (ce qui la place loin en taille de la Place de la Concorde à Paris ou de la Place Saint-Marc à Venise). On la doit à la volonté de Stanislas Leszcynski (1677 - 1766) roi de Pologne, duc de Lorraine et de bar à titre viager. Vous découvrirez l'histoire de la Place Stanislas quelques lignes plus bas, mais retenez qu'elle a été construite de 1752 à 1755. On n'a d'ailleurs fait que les façades et les grilles.
Celui qui a imaginé la Place c'est l'architecte Emmanuel Héré (1705 - 1763) originaire de Lunéville en Lorraine). Il a été entouré de grands talents d'ici tel Jean Lamour (1698 - 1771) originaire de Nancy. Serrurier et ferronnier, Jean Lamour a apporté les célèbres grilles. Il ne faut pas oublier Barthélémy Guibal (1699-1757) qui a réalisé les statues des fontaines et aussi les innombrables petits trophées, souvent des enfants, qui couronnent les toits.
On distingue 5 grands bâtiments : l'hôtel de ville (le plus grand), et 4 pavillons (dont vous découvrirez les noms et les fonctions ci dessous). Une partie de la place est constituée des "basses-faces", à un seul étage, pour permettre aux militaires de tirer depuis les remparts (situés derrière la place et en grande partie disparus) en cas de guerre. Plus loin, les "trottoirs" ou la rue Héré mène à l'arc de Triomphe. La place a longtemps été un lieu de passage au beau milieu de la ville (à cheval d'abord, en voiture ensuite), elle a servi de lieu pour les défilés militaires, pour l'envol de montgolfières. Elle a aussi été un parking avant de devenir piétonne en 2005 lors des travaux de métamorphose de la place. Parés à visiter ? Let's go !
Les grilles
On les doit au génie de Jean Lamour (1698-1771). Un ferronnier (et aussi serrurier et fabricant de réverbères à la base...). Elles sont dorées à la feuille d'or ce qui fait qu'à la moindre éclaircie, ou après une averse, elles brillent et donnent beaucoup de noblesse, mais aussi un petit grain de folie, à la place Stanislas. Elles sont en fer forgé. Il y a 6 ensembles sur la place, dont deux, monumentaux, autour des fontaines.
L'une des grilles de Jean Lamour sur la place Stanislas de Nancy / Photo Monsieur de France (c)
Si vous observez bien les grilles, vous verrez qu'on voit des L et des S entrelacés et c'est normal puisque la Place Stanislas est entièrement dédiée à la France et au roi Louis XV le gendre de Stanislas. La place "royale" c'est son premier nom a été faite pour rappeler aux Lorrains qu'à la mort du roi Stanislas, la Lorraine deviendrait Française. On voit donc le L de Louis XV s'entremêler au S de Stanislas (ce qui est amusant quand on sait que Louis XV ne supportait pas son beau-père qu'il trouvait trop fantasque et un peu looser). On voit aussi des couronnes royales au-dessus de certaines portes (la couronne de France) et la fleur de lys emblème des rois de France. A propos des grilles, pensez aussi à regarder les reverbères. Ceux qui sont sur les façades sont nés en même temps que la Place. Ils sont, eux aussi, très Français puisqu'il s'agit de coqs gaulois, symboles de la "vigilance". D'autres réverbères, sur la place cette fois, ont été ajoutés à la fin du XIXe siècle en gardant l'esprit des plus anciens, ce qui donne beaucoup d'allure à l'endroit le soir venu...
Les fontaines
On les doit au talent de Barthélémy Guibal (1699 - 1757), originaire de Nimes dans le sud de la France, il a fini sa vie en Lorraine. Il a aussi réalisé tous les trophées qui couronnent les batiments de la place. Regardez les avec plaisir il n'y en a pas un qui ressemble à l'autre. On y voit beaucoup de petits "puttis" des enfants qui sont occupés. Certains discutent, d'autres regardent les passants...
La fontaine de Neptune de la Place Stanislas de Nancy / Photo shutterstock
Il y a deux fontaines. A gauche de l'Arc Héré, on reconnait Neptune, dieu de la mer (facile de le reconnaitre il a un trident). On voit aussi des tritons, et un petit gamin qui pleure. C'est normal, à l'origine un homard lui mordait le doigt (il a disparu depuis mais le gamin pleure toujours). Au dessus de la fontaine (et c'est le cas aussi pour l'autre fontaine) on voit les pleines armes de France avec les trois fleurs de lys d'or sur fond d'azur, l'ordre du Saint Esprit (terminé par une croix et une colombe) et l'ordre de Saint Michel, les deux grands ordres de chevalerie de la couronne de France.
La fontaine d'Amphitrite de la Place Stanislas de Nancy / Photo choisir par Monsieur de France : milosk50/Shutterstock.
A droite de l'Arc Héré, on trouve la fontaine d'Amphitrite, déesse de la Mer. Elle était entourée de deux groupes comme son mari, Neptune, mais ils ont été supprimés quand on a décidé d'ouvrir un accès à la Pépinière, devenue parc public à la fin du XIXe siècle. On sait que la statue, dénudée, choquait beaucoup l'aumônier de Stanislas. Certains disent que le corps de la déesse aurait été moulé sur celui de la marquise de Boufflers, maîtresse royale de Stanislas, dont on verrait, par conséquent, le sein...
L'arc Héré
C'est le couronnement de la Place Stanislas. Il est très inspiré de l'Arc de triomphe de Septime Severe à Rome et du Carrousel du Louvre. Il a été créé pour permettre un passage à travers les remparts qui se trouvaient là et qui expliquent sa grande largeur et les arches qu'on trouve à l'intérieur. On pouvait d'ailleurs rejoindre le parc de la Pépinière en passant sur l'Arc Héré au XIXe siècle.
L'arc Héré de la Place Stanislas de Nancy. Photo choisie par Monsieurdefrance.Fr : shutterstock
Il est magnifique. Il est dédié à Louis XV qui figure dans un médaillon au sommet. Il est constitué de 3 portes. Au-dessus de la porte de gauche, est inscrit "principi victori" (le prince victorieux) et au dessus de la porte de droite est inscrit "principi pacifico" (le prince de la Paix). Au-dessus figure des plaques qui représentent le dieu Apollon (qui joue de la Lyre avec les muses). Elles ont été réalisées quand Louis XIV a voulu annexer Nancy au XVIIe siècle et on été ré-employées ici (on ne gâche rien !)
Au-dessus encore, des statues. A gauche il y a Cerès et Minerve, à droite il y a Mars (dieu de la Guerre) et Hercule (on le reconnait à la masse qu'il tient négligemment.). Et pour couronner le tout, il y a un acrotère (un mot assez moche c'est vrai) c'est-à-dire un groupe de trois statues : Minerve à gauche, à droite, c'est la Paix, et celle qui a une trompette, c'est Fama, déesse de la gloire, qu'on appelle aussi "la Renommée" et qui souffle dans sa trompette la renommée de Louis XV qui est représenté dans le médaillon que les trois déesses soutiennent (on le reconnait facilement avec son nez si typique de la famille de Bourbon). Volée dans les années 80, la trompette a été remplacée.
Le sommet de l'Arc Héré, avec le médaillon de Louis XV et la Renommée. Photo choisie par monsieurdefrance.fr : Shutterstock
L'arc héré est précédé de la rue Héré (et les boutiques sont sympas, notamment la boutique Daum qui présente des merveilles de pâte de verre nées des mains des maîtres verriers de Nancy). Cette rue s'est longtemps appelée "trottoirs Héré" parce que ces trottoirs, qui permettaient aux pietons de ne pas se crotter les pieds dans la boue des rues, ou dans le crottin des chevaux, étaient une grande nouveautée en 1755.
La Statue de Stanislas
La statue de Stanislas depuis 1831 au centre la Place Stanislas de Nancy. Photo choisie par monsieurdefrance.fr : RossHelen/shutterstock
Célébrissime statue que tous les Nancéiens connaissent. Elle sert souvent de point de rendez-vous. Mais attention, le socle est si grand qu'on peut arriver à un endroit et rater la personne qui vous attend de l'autre côté. On a été nombreux à attendre un moment avant de se voir donc je vous conseille de faire le tour. Elle date de 1831.
Elle a remplacé plusieurs statues. La première était celle de Louis XV, à qui été dédiée la Place au départ à sa construction en 1755. Il était représenté en empereur romain, regardait vers Paris et brandissait un bâton de commandement vers... L'hôtel des impôts (hôtel des fermes à l'époque). A ses pieds, quatre vertus assises, accoudées aux marches, le regardaient (comme des groupies). On voyait la prudence, la justice, la valeur et la prudence.
La Statue de Louis XV située à l'origine sur la place au moment de sa création en 1755. Par Dominique Collin — Archives municipales de Nancy Cote 3 Fi 141 Domaine public, https://commons.wikimedia.org
L'ensemble était entouré d'une grille qui a été démontée après la Seconde Guerre mondiale au moment de la création d'un portail et qu'on n'a jamais remise. Cette statue (qui faisait quand même 7500 kg de bronze !) a été détruite par la Révolution Française et remplacée par des piques révolutionnaires avant qu'on ne se décide à installer "le génie de la France", en l'occurrence une femme brandissant une couronne de laurier.
La statue de Stanislas par Georges JACQUOT sur la Place Stanislas de Nancy depuis 1831. Photo choisie par monsieurdefrance.fr : inavanhateren/shutterstock
Enfin, en 1831, quand on décide de nommer la Place "Place Stanislas" (elle qui a été Place Louis XV, Place du Peuple, Place Napoléon...) en hommage à celui qui l'a voulue, le roi Stanislas, il a été décidé d'y installer une statue. Elle a été réalisée par Georges Jacquot un jeune sculpteur qui avait proposé deux versions. Une version de Stanislas en guerrier. L'autre, c'est celle que nous connaissons. On voit le roi paré de son manteau royal. À côté de lui la couronne royale. Sur le piédestal, on rappelle quelques-unes de ces bonnes actions qui ont fait de lui un homme très aimé des Lorrains alors qu'il venait d'ailleurs et leur avait été imposé par la France.
La statue pèse 5 400 kg de bronze, qu'on cire régulièrement. Elle mesure 4,13 mètres de haut. On a longtemps dit que Stanislas montrait la direction de son pays d'origine, la Pologne. En fait, il pointe du doigt le médaillon de Louis XV pour rappeler qu'il a fait faire la place pour son gendre. Le doigt est d'ailleurs très long, genre E.T, quand on le voit de près, mais c'est pour permettre de voir de loin le geste, qu'il a été allongé par le sculpteur dont l'oeuvre est ici depuis le 6 novembre 1831.
L'hôtel de ville
Il est facile à reconnaître puisque c'est le plus grand bâtiment et c'est d'ailleurs celui que Stanislas ne verra jamais puisqu'il lui tourne le dos. L'hôtel de ville a longtemps été situé à droite, alors que la partie gauche était un hôtel particulier, les deux étant reliés par la façade qu'on voit depuis la place. C'est en 1890 qu'on a abattu l'hôtel de Rouerke pour faire un seul bâtiment (qui a été agrandi à l'arrière dans les années 50). L'ancien hôtel de ville, situé place Charles III a été détruit au moment de la construction de celui qu'on connait aujourd'hui.
La façade de l'hôtel de Nancy, pavoisée aux grandes fêtes nationales (14 juillet, 8 mai...) mais aussi pour marquer des évenements (soutien à une cause... )Sina Ettmer Photography/Shutterstock.com
D'extérieur et de haut en bas, on voit d'abord une horloge, surmontée de 3 drapeaux : le drapeau français (c'est la mairie), le drapeau Lorrain (jaune avec une bande rouge frappée de trois alérions blancs) et le drapeau européen. L'horloge est entourée par la justice à gauche et la prudence à droite. Au fronton, sous l'horloge, se voient les armes du roi Stanislas à qui on doit le batiment et la place (il a offert la place et la mairie à la municipalité de Nancy dès l'inauguration.) Plus bas encore, une femme (peut-être Nancy ?) tient le blason de la ville de Nancy composé des armes des ducs de Lorraine et de Bar en sommet (elle était leur capitale.) et célèbre chardon, emblème de la ville dont la devise est : qui s'y frotte s'y pique en mémoire de la bataille de Nancy, en 1477, et la défaite et la mort de Charles le Téméraire, duc de Bourgogne, qui voulait annexer Nancy et la Lorraine a ses états. On retrouve enfin les armes de Stanislas, cette fois dorées, sur le balcon central.
Le fronton de l'hôtel de ville avec la justice à gauche et la prudence à droite. photo par Khun Ta/shutterstock
A l'intérieur, on découvre le péristyle et ses colonnes, l'escalier d'honneur dont la rambarde est due au ferronnier Jean Lamour et les peintures (trompe-l'œil et plafonds) à Jean Girardet (1707 - 1778). Au premier étage, le Salon Carré (ou Salon de l'Académie parce que l'Académie de Stanislas y siégeait et y remet toujours ses prix), est la seule pièce que Stanislas a connu. Là encore Jean Girardet a réalisé les peintures (pas très réussies d'ailleurs). On y voit Stanislas conduisant le char d'Apollon Dieu des arts. Passé le salon carré, on découvre "les grands salons" qui datent de 1866 et du centenaire de l'union de la France et de la Lorraine. Elles sont d'ailleurs représentées sur le plafond par Aimé Morot. On dit que le peintre a donné à la Lorraine, qu'on voit nue et de dos, les traits de sa maîtresse, après avoir appris qu'elle le "partageait" avec un autre et avoir décidé que puisqu'un autre le voyait aussi, autant que tout Nancy voit le derrière de la dame... Élégant hein ! On peut aussi voir les armoiries de la ville de Nancy et les balcons où se produisaient les orchestres lors des soirées de gala. De magnifiques peintures de Emile Friant, sur les différents âges de la vie, ont longtemps orné les murs avant d'être déplacées au musée des beaux arts et remplacées par des miroirs).
Le pavillon Jacquet
Situé à droite de l'hôtel de ville. C'est un bâtiment privé depuis l'origine. Appartenant à Monsieur Jacquet, l'un des premiers propriétaires de terrains sur la place en 1755. Il a longtemps été un magasin de mode. Deux cafés occupent le rez-de-chaussée, le café du commerce à droite, et le Grand Café Foy à gauche. Il tient son nom de Maximilien-Sebastien Foy (1775-1825) un général d'empire dont le buste est à l'intérieur.
Le musée des beaux-arts
C'est là qu'étudiaient, quand la place a été créée, les élèves chirurgiens et médecin au sein du collège de Médecine. Puis le pavillon est devenu le théâtre municipal (on voit beaucoup de masques de comédie dans l'entrée, ce qui rappelle son ancienne fonction). Un incendie a détruit la Comédie en 1906 et le Musée des beaux-arts, d'abord situé dans l'hôtel de ville, a été installé là en 1936 après des travaux. Il a été agrandi en 1999.
L'annonciation par le Caravage (entre 1608 et 1610). Musée des beaux-arts de Nancy
Il a plusieurs originalités. D'abord, beaucoup d'œuvres ayant appartenu aux ducs de Lorraine figurent dans les collections, comme l'Annonciation signée du Caravage et achetée par le duc Henri II de Lorraine et de Bar au début du XVIIe siècle. Ensuite, il offre une belle présentation d'artistes lorrains avec de rarissimes peintures signées Claude Gelée dit "Le Lorrain" (né à Chamagne dans les Vosges en 1600), une très belle collection de gravures signées de Jacques Callot (1592-1635) né à Nancy, des œuvres magnifiques d'Emile Friant (par exemple : la Toussaint) ou de Victor Prouvé.
Emile Friant / Autoportrait 1888. Musée des beaux arts de Nancy
Enfin, il ne faut absolument pas rater la plus grande collection Daum du monde. Des "pièces" en cristal ou en pâte de verre réalisées pendant plus de 150 ans par la manufacture Daum à Nancy. On peut faire des photos magnifiques.
Le Grand hôtel de la Reine - Pavillon Alliot
Il est situé à gauche de l'hôtel de Ville. C'est un hôtel très agréable, avec des salons royaux qui permettent de donner des receptions en admirant la plus belle place du monde. C'est le spot idéal, aux beaux jours, pour boire un verre en terrasse puisque c'est l'endroit qui est ensoleillé le plus longtemps sur la Place. Il s'appelle "Grand hôtel de la Reine" parce que Marie-Antoinette y a séjourné quelques heures en 1769 pour y écouter des poésies sur la route qui la menait épouser le futur Louis XVI. Il faut préciser que Marie-Antoinette était Lorraine par son père, François 1er (François III de Lorraine), né au château de Lunéville et descendant des ducs de Lorraine qui avaient Nancy comme capitale et qui reposent dans la crypte de la chapelle ronde en l'église des cordeliers. Longtemps hôtel de l'intendance (une sorte de préfecture), il a été aussi un bâtiment privé.
Hubert Lyautey par Eugène Pirou (1841-1909) dans Histoire de la Marine française illustrée, Larousse, 1934.
C'est au balcon du Grand hôtel que la vie de Hubert Lyautey a changé. En mai 1856, alors qu'il a 18 mois et qu'il est dans les bras de sa bonne d'enfants, celle-ci, voulant saluer son homme qui défilait sur la place avec d'autres militaires, l'a laissé tomber. L'enfant a du rester alité pendant 2 ans, et il a porté un corset de fer pendant plus de 10 ans. Cet empêchement de bouger et de faire du sport est à l'origine du génie militaire de Lyautey. Le petit Hubert a passé des heures, assis ou alité, à lire, plutôt des livres racontant l'histoire et l'armée, ce qui lui a donné la passion des armes. Cette passion et une grande intelligence on fait de lui un grand maréchal (ses obsèques nationales ont eu lieu à Nancy en présence du président de la République et de nombreux représentants étrangers). C'est aussi parce qu'il n'a pas pu faire de sport quand il était petit que le maréchal Lyautey s'est beaucoup engagé dans la fondation du scoutisme en France. Passionné du Maroc dont il a été gouverneur, il s'est fait installer des pièces marocaines très belles dans son château de Thorey Lyautey à 40 km de Nancy près de la colline de Sion. Il repose aux Invalides à Paris.
A gauche l'Opéra National de Lorraine à droite le Grand hôtel de la Reine / wsf-s/shutterstock.com
L'Opéra National de Lorraine.
Il est situé dans ce qui était l'hôtel des fermes (une sorte d'hôtel des impôts) au moment de la construction de la Place Stanislas en 1755. Devenu siège de l'évêché de Nancy en 1802, il est entièrement détruit en 1909 sauf la façade qui est toujours celle que Stanislas a connu. Derrière cette façade, pendant 10 ans, des travaux gigantesques permettent la construction d'un magnifique opéra "à l'italienne" dont les décors, rouge, blanc et or, s'accordent parfaitement avec la Place Stanislas, au point qu'on pourrait les imaginer construits à la même époque alors qu'ils ont un petit peu plus de 100 ans. On trouve d'ailleurs quelques petites notes art-nouveau, et même art déco dans les mosaïques. Inauguré le 14 octobre 1919, comptant 1050 places, il résonne de multiples talents et c'est l'un des plus renommés de France.
Découvrez la programmation de l'Opéra National de Lorraine ici.
Les basses faces
C'est le nom donné aux bâtiments à un étage situés entre les fontaines et la rue Héré. Ces bâtiments ne devaient pas exister au départ car le Maréchal de Belle-Isle, gouverneur des Trois-Evêchés et gouverneur militaire de la Lorraine, voulait pouvoir utiliser les remparts qui se trouvaient derrière pour bombarder si un ennemi s'emparait de la région. Stanislas dut beaucoup insister et ils finirent par couper la poire en deux. Les bâtiments situés le long des remparts n'auraient pas deux étages comme les autres bâtiments, mais un seul et en forme de mansardes. C'est dans ces "basses faces" que furent installés les premiers "cafés" de Nancy, ainsi nommés parce qu'ils servaient... du café.
Les basses faces se sont les batiments qu'on voit au fond de la photo de la place stanislas de Nancy. Photo Pete Stuart/shutterstock
C'est à la table d'un de ces cafés que Mozart s'est assis pour écrire à son père lors d'un voyage à Paris. Une lettre dans laquelle il parle avec plaisir de "la beauté des rues et des places de Nancy". C'est au fond d'un de ces cafés que Bartholdi, le père de la Statue de la Liberté, a rencontré sa femme : Emilie Baheux de Puysieux. On dit qu'il a donné ses traits à la Statue la plus célèbre du monde... Enfin, c'est au Jean Lamour, à gauche de l'arc Héré, que se trouvait la légendaire brasserie "Chez Walter". Elle occupait toute la partie gauche des basses-faces et était l'une des plus célèbres brasseries de l'Est de la France. On y servait le roi du Cambodge, les présidents de la République et toutes les stars de la Belle Epoque.
Nancy aime faire la fête sur la plus belle place du monde / photo de Roman Samborskyi/shutterstock
Cette partie de la place est très festive avec des brasseries, d'immenses terrasses, des bars de nuit et même une discothèque qui permettent de passer un bon moment entre amis ou de faire la fête (on dit ici "la chouille") à Nancy. Il y a beaucoup de jeunes et c'est normal dans une agglomération où pour 1000 habitants, il y a 200 étudiants.
Visiter l'ensemble UNESCO c'est voir :
Ce serait dommage de vous limiter à la seule place Stanislas. Ce qui est classé "Patrimoine Mondial de l'Humanité" depuis 1983, à Nancy, c'est tout l'ensemble du XVIIIe siècle. Et vous verrez que chacune des trois places a un charme bien a elle et qu'il faut absolument y faire une visite. En plus de la place Stanislas il faut donc voir :
La Place de la Carrière :
Elle est beaucoup plus ancienne que la Place Stanislas. Elle a été créée par la volonté de la duchesse de Lorraine Chrétienne de Danemark quand on a agrandi les remparts de la ville-vieille. Elle a proposé de dégager une grande esplanade, qui s'est longtemps appelé Rue Neuve, avant de devenir la Place de la Carrière parce qu'on y donnait des tournois (joutes à cheval, jeux de bagues...) et qu'ici, en enchainant les victoires, les champions faisaient carrière.
C'est Emmanuel Héré, l'architecte de la Place Stanislas, qui lui a donné son allure actuelle en s'inspirant de l'hôtel de Beauvau (devenu la cour d'appel), situé à votre droite quand vous arrivez de la place Stanislas, et qui a été construit par Germain Boffrand, architecte du Château de Lunéville et du château de Haroué, et dont Héré était l'élève. Comme les autres maisons existaient déjà, Héré a fait plaquer des façades neuves sur les façades anciennes.
Au bout de la place, deux hôtels particuliers ferment l'Hémicycle Charles de Gaulle. Un hémicycle percé de deux portes, l'une vers la ville, l'autre vers le parc de "la pépinière" et qui sont surmontées de trophées d'ennemis vaincus et enchaînés (ce qui est assez amusant quand on sait que Stanislas n'a jamais gagné une seule bataille de sa vie).
Le Palais du Gouvernement sur la Place de la Carrière à Nancy / Photo Pete Stuart/shutterstock.com
La Place est fermée par le Palais du gouvernement parce qu'il a longtemps abrité le gouvernement militaire de Nancy, très important notamment pendant l'Annexion qui, enlevant l'Alsace et la Moselle à la France en 1871, a fait de Nancy la capitale militaire de l'Est du pays. Y sont passés de grands personnages comme les généraux Foch ou Castelnau pendant la Première Guerre Mondiale. Le maréchal de Mac-Mahon, devenu plus tard, président de la République, a vécu aussi dans ce lieu prestigieux qui a été, un temps, la préfecture du département de la Meurthe, qui a disparu en 1871, et dont on voit, dans le Grand Salon, les blasons des cités qui le composaient. On peut aussi voir un magnifique escalier d'honneur réalisé par Jean Lamour, le ferronnier de la Place Stanislas, et un étonnant autel caché dans un mur du salon blanc. Enfin c'est dans ce palais que se trouve un trésor Art Nouveau : le bureau de Foch, réalisé par Louis Majorelle.
C'est sur la Place de la Carrière qu'a lieu "le Livre sur la Place" le premier salon du livre de la Rentrée littéraire et l'un des plus importants de France. Plus de 100 000 personnes viennent y rencontrer plus de 400 auteurs aux alentours du 10 septembre.
Les nancéiens disent plutôt "la place carrière" et "le palais du gouverneur", ne vous étonnez pas si vous demandez votre chemin.
La Place d'Alliance
Le monument de la Place d'Alliance à Nancy / Photo Shutterstock.com
C'est la plus petite des trois places classées par l'UNESCO avec 80 mètres par 60 mètres. Construite à l'emplacement du potager des ducs de Lorraine, elle s'est appelé Place Saint Stanislas avant de changer de nom pour devenir la Place d'Alliance comme le rappelle le monument situé en son centre et qui a été réalisé par Paul-Louis Cyfflé pour célébrer l'alliance inattendue, en 1756, des énnemis de toujours qu'étaient le royaume de France et l'Empire d'Autriche et qui se sont alliés cette année là. On y voit 3 vieillards qui représentent trois fleuves d'Europe : l'Escaut, la Meuse et le Rhin. Le tout surmonté par un petit putti qui souffle dans sa trompette la bonne nouvelle.
Elle est assez austère mais très délicate. L'auteur Maurice Barrès (1862-1923) en parle avec beaucoup de justesse dans "Colette Baudoche" et il écrit : "la petite place d’Alliance, solitaire et taciturne, où le jet d’eau dans le carré des tilleuls exhale une sorte de mélancolie » « Bien des automnes se sont entassés avec les feuilles de ces vieux arbres, sur la source Lorraine, et pourtant auprès de la Fontaine de Cyfflé, on entend toujours s’égoutter nos regrets. La mémoire de ces temps de jadis n’a pu effacer ».
Allez voir aussi :
Derrière la Place Stanislas, il y a le poumon vert de Nancy : le Parc de la Pépinière. Voulu par Stanislas en 1765, il est nommé ainsi parce qu'au départ, fermé au public, il servait à faire pousser les arbres destinés à être installés au bord des routes. Il fait 21,7 hectares. On y voit des arbres remarquables, une roserais magnifique, un parc animalier, des infrastructures sportives et même une veritable oeuvre de Rodin qui représente Claude Gelée dit "Le Lorrain". C'est un chouette lieu que "la pep' " comme disent les nancéiens. On peut s'y poser, se balader, et boire un verre. On y croise aussi beaucoup de joggers et c'est le lieux de révision des lycéens et étudiants en fin d'année scolaire.
Il n'existe que 2 kiosques à Musique comme celui de la Pépinière à Nancy. L'un en Allemagne, l'autre ici à Nancy. Photo par Gerald Mayer/shutterstock.
Non loin de la Place Stanislas il y a la Caserne Thiry, construite entre 1765 et 1769 sur les plans de Richard Mique (l'architecte du Hameau de la Reine à Versailles). Stanislas figure sur le fronton, habillé en armure.
Il faut aussi faire un détour pour voir deux autres belles idées de Richard Mique : la porte Sainte Catherine (au bout de la rue Sainte Catherine) dédiée à la femme de Stanislas, Catherine Opalinska, et sur laquelle sont représentés Apollon et les 9 muses. De même, son pendant, la porte Saint Stanislas, située près de la gare de Nancy, affiche le dieu des arts et les muses.
L'histoire de la Place Stanislas
Un roi arrivé par les hasards de la vie
Portrait de Stanislas par Van Loo (château de Versailles).
Stanislas Leszcynski (1677 - 1766) est né à Lviv dans l'actuelle Ukraine mais qui se trouvait dans le royaume de Pologne à l'époque. La monarchie de Pologne était élective à l'époque, 40 000 nobles se réunissaient dans une vaste plaine et élisaient un roi, souvent venu de l'étranger pour ne pas favoriser telle ou telle famille. Stanislas a été élu roi sous la pression du roi Charles XII de Suède et il a été chassé du trône par les Russes avant d'être obligé de s'exiler. La France lui a offert un abri en Alsace. C'est là que des émissaires de Versailles sont venus trouver Stanislas pour lui signaler que sa fille, Marie, était choisie pour épouser le roi de France Louis XV. Il faut dire que Louis XV, 15 ans à l'époque, était le seul descendant vivant Français de Louis XIV dont il était l'arrière-petit-fils. Qu'il meurt et ce serait un roi d'Espagne qui deviendrait roi de France. Du coup, pour qu'il ait des enfants assez vite, le duc de Bourbon, son Premier ministre, s'est résolu à le marier rapidement avec une femme en état d'avoir des enfants tout de suite. Une liste de 99 princesses a été établie, Marie Leszczynska (1706 - 1768) était la dernière. Il faut dire qu'à la différence des autres princesses, elle n'était pas protestante, pas orthodoxe, mais catholique, pas membre d'une famille française qui aurait été trop élevée en ayant une reine parmi les siens. Le mariage fait (et le couple a eu 10 enfants.), on a d'abord proposé Chambord à Stanislas, puis, lors de la guerre de succession de Pologne, la France a tenté de le remettre sur le trône de Pologne. Sans succès.
Marie Leszczynska reine de France, épouse de Louis XV et fille de Stanislas par Van Loo (Versailles).
Le duché de Lorraine était indépendant à l'époque. Son titulaire, François III Etienne de Lorraine (1708-1765) souhaitait épouser la future impératrice Marie-Thérèse d'Autriche. Il faut dire que la jeune fille était raide dingue du duc de Lorraine et qu'il pouvait devenir Empereur. Sauf que la France ne pouvait pas tolérer que le duché de Lorraine, si proche de Paris, devienne terre autrichienne sur le long terme, surtout que l'Autriche était l'ennemi héréditaire de la France. Pour débloquer la situation, une solution a été trouvée. François III de Lorraine pouvait épouser Marie-Thérèse s'il renonçait à ses droits sur la Lorraine. On donnerait la Lorraine à Stanislas qui conserverait le titre honorifique de roi et deviendrait duc de Lorraine et de Bar à titre viager. À sa mort, la Lorraine deviendrait Française. C'est exactement ce qui s'est passé. Arrivé en 1737 en Lorraine, Stanislas a régné sur la Lorraine jusqu'au février 1766. À son décès, ipso facto, les duchés de Lorraine et de Bar on été uni à la Couronne de France.
Un roi bâtisseur et la mode des places royales
Stanislas a toujours aimé bâtir. Alors qu'il était exilé à Zweibrucken, il a fait réaliser un étonnant ensemble de bâtiments faisant une sorte de château nommé le "tschiflick". Installé au Château de Lunéville, quand il est devenu roi de Pologne, il en a agrémenté le parc de multiples et jolies constructions éphémères, des "folies" comme disait l'époque. Il a aussi fait bâtir quelques châteaux pour y résider. Même si quelques unes ont été construites au XVIIe siècle, le XVIIIe siècle est la grande époque de construction des places royales. Rennes se pare de deux places dédiées au roi : la Place de la Mairie et la Place du Parlement. Paris voit naître la Concorde. Stanislas va donc réunir deux envies : son souhait de bâtir, et la mode architecturale de son époque pour eriger un symbole : une place royale dédiée à son gendre Louis XV, futur propriétaire du duché de Lorraine et donc de Nancy. Tout devrait rappeler la France et elle serait au coeur de la capitale des ducs de Lorraine.
Une place royale ok mais où ?
Plan de Nancy au début du XVIIe siècle par Laruelle. On voit bien les deux villes qui constituent le Nancy de l'époque. C'est pile au milieu que Stanislas bati la place, contre les remparts de la ville-vieille de Nancy et au début de la ville neuve. Photo Limedia.fr
Nancy a longtemps eu cette étrange originalité d'être constituée de deux villes : la ville vieille et la ville neuve. Au début du XVIIe siècle, le duc de Lorraine Charles III a souhaité agrandir sa capitale. Plutôt que de raser les remparts de la vieille cité, il a décidé de les conserver, et même de les améliorer et de faire construire une deuxième ville de Nancy, toute neuve, au bout de la ville d'origine. Cette ville, 5 fois plus grande que la ville du moyen-âge, était constituée de rues se croisant à angle-droit (Concept très moderne à l'époque.) À la jointure entre les deux villes, au commencement de la ville nouvelle et devant les remparts de la ville ancienne, se trouvait une vaste esplanade. C'est là que la Place a été construite. Il faut dire que plusieurs endroits ont été évoqués en 1751 quand Stanislas a commencé à réfléchir à l'endroit où il bâtirait sa place. Alors qu'il évoquait déjà de construire la place sur l'esplanade, les militaires lui ont rétorqué que les constructions masqueraient les remparts et qu'il serait difficile de défendre la ville-vieille. Il a ensuite imaginé la faire sur la Place centrale de la ville Neuve, la place du marché, où se trouvait l'hôtel de ville et le tribunal de Nancy. Les bourgeois de la ville ont protesté que ce serait trop cher et trop de travaux. Stanislas a fini par trancher. Il construirait sa place royale sur l'esplanade. Elle aurait l'avantage de faire le lien entre les deux villes de Nancy.
Un chantier de 4 ans.
Le 18 mars 1852, le grand-duc Ossolinski (qui a longtemps partagé sa femme avec Stanislas) a l'honneur de poser la première pierre du chantier. Ce chantier fait travailler 400 ouvriers. Jean Lamour forge ses grilles à quelques mètres dans la primatiale. Les travaux sont assez rapides puisqu'il ne faut "que" 3 ans et demi pour terminer. Il faut dire que, comme toutes les places royales, on ne fait que les façades pour de nombreux bâtiments, charge à ceux qui possèdent les terrains de construire ce qu'ils veulent s'ils ne touchent pas les façades. Des modifications ont été apportées au plan initial. Par exemple, on ne fait des bâtiments qu'a un seul petit étage le long des remparts pour ne pas empêcher les militaires de bombarder la place si l'ennemi venait à s'en emparer. De même, pour masquer les fossés et remparts, on décide d'ajouter 2 fontaines en demi-cercle aux extrémités de la place. Elles sont même démontables en cas de besoin. Elles sont toujours là.
Stanislas Lesczinski, roi de Pologne, visitant les ateliers de Jean Lamour à Nancy, dessin de Jean Baptiste Bénard en 1755.
L'inauguration pleine de surprises
La Place Royale (c'est son nom à l'époque.) est inaugurée par Stanislas le 26 novembre 1755 au matin. Le roi fait une entrée solennelle dans la ville, par la Porte Saint-Nicolas. 7 carrosses au total, qui sont salués par une foule considérable. Sur la place, il y a un monde fou. Au soir, on fait couler du vin, plutôt que de l'eau, dans les fontaines toutes neuves. Parvenu sur sa place, Stanislas gravit l'escalier de Jean Lamour, qui est toujours celui que nous connaissons, et il parvient au balcon pour saluer la foule. C'est à ce moment-là qu'un morceau de plâtre du plafond tombe. Il a séché trop vite. Le bruit de la chute et le fait qu'elle se produise tout près du roi cause un début de panique. La garde sort les armes, des courtisans s'enfuient, l'un deux saute du balcon, il en restera blessé et déshonoré pour avoir fui le danger. Seul Stanislas ne bouge pas, au balcon, heureux de contempler son œuvre.
Une histoire continuée après Stanislas.
Terrasses sur la Place Stanislas : un délice en été. Photo choisie par Monsieurdefrance.fr : olrat/shutterstock.
La Place Royale est, tout de suite, l'objet de la fierté des Nancéiens et de nombreux "touristes" viennent la voir. On la modifiera avec le temps. Son nom, notamment, va évoluer en fonction de l'actualité politique. En 1792, elle n'est plus place royale, puisque la Monarchie a disparu, mais place du peuple, et la statue de Louis XV est détruite, fondue à Metz pour faire des canons. En 1805, elle devient place Napoléon. Elle redevient place Royale en 1814 au retour de la monarchie et enfin Place Stanislas en 1831. Entre temps, le sol, fragile, a été modifié. Au XIXe siècle, on ajoute les réverbères sur le sol de la Place, ils sont 8 au départ. C'est aussi après 1873, quand Nancy devient une ville militaire de première importante, le lieu privilégié des défilés militaires. Brûlé en 1906, la Comédie devient l'Opéra et est reconstruite à la place de l'évêché, alors qu'un musée des beaux-arts est installé à la place de la Comédie. 1958 la voit être aplatie pour faire place à un parking qui subsiste jusqu'en 2005, l'année de sa rénovation et le moment où elle devient piétonne. Les terrasses deviennent plus importantes. On peut se poser sur les lices en bois. Des spectacles sont projetés sur les façades chaque année en été et à la Saint-Nicolas.
La Place Stanislas de Nancy : infos / géo / train
Adresse GPS :
1, Place Stanislas 54 000 NANCY
En voiture
Nancy est située à 347 kms de Paris. Département de Meurthe et Moselle (54), région historique de Lorraine et région administrative Grand Est.
Il faut environ 4 heures pour venir de Paris via l'A4, l'A5 et A31, ou la N4. La ville est aussi à 1H15 de Luxembourg, 1H30 de Strasbourg. Des parkings sont situés non loin de la place. Par exemple Place de la Carrière.
En train
Nancy est dotée d'une gare TGV qui met la cité à 1H40 de Paris. Il existe aussi la gare "Lorraine TGV" située entre Nancy et Metz et raccordée au réseau TGV qui la met à 4H00 de Nantes, Rennes, ou Bordeaux. Une navette permet de rejoindre la gare de Nancy. Depuis la gare, il faut sortir sur la Place Simone Veil. Le plus rapide pour se rendre Place Stanislas à pied est de sortir de la place Veil à gauche, de passer sous la porte monumentale (porte Stanislas) et de descendre toute la rue (Rue Stanislas), jusqu'à la Place... Stanislas. Mais nous vous conseillons de prendre plutôt par la Rue Saint Jean. La grande artère commerçante de Nancy.
Les sites internet
Le site officiel de Destination Nancy vous donnera toutes les infos pour un beau séjour dans la ville. Vous y trouverez des idées et les horaires. Il est très bien fait nous vous le conseillons.
Pour des visites guidées originale avec des passionnés et découvrir des gourmandises, pensez à contacter La madeleine Nancy vous ne le regretterez pas.
Vous pouvez aussi aller voir le site de Meurthe et Moselle L'esprit Lorraine qui vous donnera des idées pour élargir la visite (Lunéville, Toul, Pont à Mousson et la Colline de Sion méritent le détour).
Pour une vison plus régionale il y a explore Grand Est.
Horaires et conseils
La place est vivante toute la journée. Les bars de nuit prennent le relais des cafés et restaurant la nuit. Le meilleur moment pour en profiter c'est le matin tôt, en prenant un petit café. En été, quand il fait chaud, un léger courant d'air fait plaisir au moment de l'apéro. En été, à 22H45 jusqu'au 15 août et à 22H jusqu'à mi septembre, un spectacle de 15 minutes est projeté sur les façades. On peut en profiter gratuitement soit assis par terre (la place est néttoyée chaque matin) soit en terrasse. C'est magique. La même chose est proposée en décembre au moment de la Saint Nicolas.